mardi 19 février 2013

Le coton, préparation des fibres cellulosiques à l'ennoblissement

Salut à tous! Après de longs moments passés à travailler, je reviens ENFIN sur mon blog textile... Ca va me permettre de faire quelques révisions avec vous, c'est déjà ça de pris.

Une partie qui m'avait bien plu était tout ce qui touche à l'ennoblissement du coton et autres fibres cellulosiques.



1. Qu'est-ce que l'ennoblissement?

Comme son nom l'indique, c'est l'ensemble des opérations permettant de rendre noble un textile, un fil, ou une fibre. Dans ces opérations, on retrouve:
- la préparation de la fibre avant sa teinture (ce qui nous intéresse aujourd'hui),
- la teinture ou l'impression,
- les apprêts.

2. Petite présentation des fibres de coton
Les fibres de coton sont constituées par un duvet de couleur blanche attaché aux graines du cotonnier (elle est néanmoins souvent salie par des morceaux de feuilles, parasites, etc... ce qui nécessite un nettoyage avant toute utilisation textile). Notez que le coton se cultive majoritairement dans les régions tropicales, au sud des USA (rappelez-vous de l'esclavage, les esclaves ramenés d'Afrique travaillaient au sein de champs de coton) et en Chine.

Plan de cotonnier

Le coton est une fibre naturelle, végétale, composée essentiellement de cellulose. C'est la fibre textile la plus manipulée au monde et elle représente à elle seule près de 19 million de tonnes traitées par an.



3. Morphologie des fibres de coton: la clé pour comprendre leur comportement

A/ Longueur
Les fibres de coton les plus utilisées sont des fibres appelées 'courtes' car la longueur d'une fibre se situe autour de 18 à 25mm (en Egypte, le coton peut présenter des fibres longues jusqu'à 60mm).

B/ Structure
La fibre de coton présente une forme spiroïdale, c'est à dire qu'elle dispose d'une section en forme de haricot avec un canal interne creux.
NDLR: c'est par ce canal interne que va pénétrer le bain de teinture par la suite.
Elle se décompose en trois parties:



  • Ce fameux LUMEN qui constitue le canal interne de la fibre 
  • La PAROI SECONDAIRE qui entoure le LUMEN, elle représente 90% du poids de la fibre. Elle se compose de 3 couches successives enroulées en spirale autour de l'axe de la fibre.
  • La PAROI PRIMAIRE, qui entoure la PAROI SECONDAIRE.
  • Puis la CUTICULE qui recouvre la fibre de coton. elle se compose principalement de graisses et de cires.
NDLR: la graisse n'aime pas l'eau, cette cuticule rend donc le coton hydrophobe. Il faudra l'éliminer avant de tenter quelque opération dans un milieu aqueux que ce soit...


4. Rentrons enfin dans le vif du sujet: la préparation des fibres de coton brutes
Cette préparation s'effectue en 5 étapes CRUCIALES. Si une seule n'est pas effectuée, les résultats du coton à la teinture ou au lavage risquent d'être désastreux...

A/ FLAMBAGE
B/ DESENCOLLAGE
C/ ALCALINISATION
D/ DEBOUILLISSAGE
E/ BLANCHIMENT

A/Flambage
Le but de cette opération est de 'flamber' le duvet de coton présent autour du tissu 100% coton. En effet, cela donnera un aspect plus net et propre au tissu, tout en assurant à la teinture une couleur uniforme (le duvet n'a pas la même affinité tinctoriale, c'est-à-dire qu'il n'absorbera pas la teinture de la même manière que le tissu ce qui risque de créer des différences de rendu).
Pour cela, le tissu passe dans une flambeuse, c'est à dire qu'il passe entre différents rouleaux pour qu'il soit bien tendu et qu'on le passe sous une rampe à gaz qui produit du feu sur toute la laize du tissu (sa largeur). Le tissu traité à plat, cela s'appelle également un passage "au large".

En agissant sur la puissance de la flamme ou sur sa proximité avec le tissu et sur la vitesse de passage de celui-ci, il est possible de louper son flambage ou de mettre le feu au tissu, c'est donc une opération très délicate. Une fois que le réglage est validé, il n'est plus changé pour un même tissu.

Le coton en l'état initial est brut, mais a été traité en filature (on a donc du fil de coton) et éventuellement en tissage (on a alors un tissu de coton) ou en tricot (on a alors un tricot de coton). Toujours est-il que pour ne pas casser 

B/ Désencollage
Le tissu coton a à présent une structure bien nette et n'a plus de duvet (dessus/dessous).
Lors du processus de filature et de tissage du coton, celui-ci a été recouvert de produits chimiques d'encollage permettant de lui assurer une bonne résistance mécanique lors de ces opérations (ce serait dommage que le fil casse dans la machine à tisser...). Le tissu doit donc être débarrassé de ces produits chimiques avant la teinture, il va donc passer dans un bain de désencollage (qui va également servir, suite au flambage, à refroidir le tissu pour éviter son ignition - combustion sans flamme du tissu).
Selon le produit chimique utilisé pour l'encollage (encollage amylacé = dérivés d'amidon, encollage PVA ou encollage CMC ou PAC), il faut d'abord tester le tissu pour savoir quel produit d'encollage a été utilisé (ces informations ne sont que très rarement transmises à l'ennoblisseur)...

Une fois le produit déterminé, voici les traitements à mener:

a. il s'agit d'un encollage amylacé:

Alors il faut mettre le tissu en contact avec des enzymes qui éliminent les amidons, à savoir les AMYLASES.

b. Il s'agit d'un encollage hydroculoble (PVA, CMC, PAC, etc...)
Alors il faut mettre le tissu dans un bain contenant un détergent, avec du mouillant et du dispersant, à une température de 60 à 90°C.

NDLR: Ces traitements de désencollage peuvent être menés :
- par épuisement : le tissu est mis dans son bain et il absorbe la totalité des produits chimiques,
- par imprégnation: le tissu est trempé dans un bain puis passé au foulard (compressé entre deux rouleaux) pour s’imprégner des produits chimiques.


C/ Alcalinisation

Ce procédé s'appelle également caustification ou mercerisage.
Le coton est mis en contact avec une solution alcaline (basique) diluée de soude ou d'ammoniac. Ce traitement rend la fibre de coton plus gonflante et plus résistante mécaniquement, tout en augmentant l'affinité tinctoriale (la capacité du coton à absorber le colorant).

Cette opération n'est pas obligatoire, mais elle garantit une fibre de coton de meilleure qualité pour la suite du processus.

D/ Débouillissage

Sur le tissu restent encore des graisses, cires (rappelez-vous de la cuticule)... qui rendent le coton hydrophobe  il faut les éliminer.
Comme vous pouvez vous en souvenir de vos cours de chimie de 1ère... ou pas, il est facile d'utiliser le procédé de SAPONIFICATION pour supprimer ces graisses.

En effet, GRAISSE + SOUDE --> SAVON SOLUBLE dans l'eau

Il est ensuite important de laver le tissu pour éviter que les impuretés ne se redéposent dessus, et pour éliminer le savon formé.

E/ Blanchiment

Le but de cette opération est de rendre le coton blanc, c'est à dire de supprimer ses pigments naturels jaunâtres éventuellement présents sur la fibre et les 'puces' du coton (rassurez-vous, il s'agit des petites particules foncés prises dans le coton issues de débris végétaux).

Il est possible de procéder par deux façons, ou en les utilisant l'une après l'autre:
- en utilisant de l'eau de javel (technique la moins utilisée),
- en utilisant de l'eau oxygénée en milieu alcalin(basique).

Notez que toutes ces opérations, comme tout ce qui concerne l'ennoblissement, nécessite l'utilisation de beaucoup d'eau et de produits chimiques. C'est pour cela, étant donné l'entrée en vigueur de REACH et des réglementations en faveur du respect de l'environnement, que toutes ces opérations d'ennoblissement textile ne se font plus que très rarement en Europe (beaucoup de frais dans le retraitement des eaux et le remplacement des produits chimiques par d'autres moins néfastes), mais plutôt dans les pays en voie de développement n'ayant pas encore mis en place ce type de réglementation.